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L'Histoire de France, de l'Europe & du Monde

En 1945, les Etats-Unis et l’URSS sont alliés contre l’Allemagne nazie, dont l’idéologie est aussi éloignée de l’idéologie américaine que de l’idéologie soviétique. Pourtant, très rapidement, à la suite de la capitulation allemande le 8 mai 1945, les relations se tendent entre les deux Grands. Si aucun affrontement direct n’a lieu du fait de l’ « équilibre de la terreur » (crainte d’une guerre nucléaire), les deux superpuissances luttent sur des territoires périphériques, en Europe ou dans le Tiers-Monde. Ce qui est appelé la « guerre froide » s’amorce dès 1947 et ne se terminera qu’en 1991, à la suite de l’effondrement de l’URSS.

Les débuts de la guerre froide (1947-1953)

La montée des tensions

Jusqu’au 8 mai 1945, les Etats-Unis et l’URSS forment la « Grande Alliance » avec la France et le Royaume-Uni, laquelle ne survit pas à la victoire contre l’Allemagne nazie. L’URSS ressort de la guerre victorieuse avec un énorme capital de sympathie dans le monde. Elle occupe l’ensemble des pays de l’Est mais n’entend pas s’y retirer : Winston Churchill dénonce rapidement la prise du pouvoir par l’Armée rouge dans ces pays et évoque l’existence d’un « rideau de fer » coupant l’Europe en deux. Aux Etats-Unis, la président Truman, qui craint que la misère en Europe en 1945 ne la fasse basculer dans le camp du communisme, définit une doctrine visant à endiguer l’avance soviétique dans le monde (théorie du containment). A partir de 1947, les Etats-Unis aident l’Europe occidentale à se reconstruire avec le plan Marshall (1948-1952). L’Alliance atlantique, réunissant les Etats-Unis, le Canada et les pays d’Europe occidentale, naît en 1949 et se dote d’une organisation militaire : l’OTAN.
En réaction, l’URSS adopte la doctrine Jdanov qui présente le monde comme divisé en deux blocs irréconciliables engagés dans une lutte à mort. Les partis communistes européens se voient imposés une obéissance absolue à Staline. Le Kominform, bureau d’information créé en septembre 1947, doit servir d’organisme de liaison entre le Parti communiste soviétique et les partis frères (Pologne, Yougoslavie, Bulgarie, Roumanie, Hongrie, Tchécoslovaquie, Italie et France). En Europe de l’Est, les opposants au communisme sont réduits au silence, emprisonnés ou exécutés.

La question allemande

La conférence de Potsdam a divisé l’Allemagne en quatre grandes zones d’occupation américaine, britannique, française et soviétique. En juin 1948, les Etats-Unis, le Royaume-Uni et la France entreprennent d’unifier leurs zones d’occupation avec une monnaie unique, le DeutscheMark. Les Soviétiques ripostent avec le blocus de Berlin-Ouest, blocus qui va durer 322 jours durant lesquels la population de la ville (2,2 millions de personnes) ne va être approvisionnée que par le biais d’un pont aérien. Le 12 mai 1949, l’URSS lève le blocus. L’Allemagne se divise en deux Etats : à l’Ouest la RFA (République fédérale d’Allemagne), à l’Est la RDA (République démocratique allemande). Le 8 mai, la Loi fondamentale de la RFA (Constitution) est adoptée et Konrad Adenauer est choisi comme premier chancelier le 15 septembre. En 1954, la RFA rejoint l’Alliance atlantique.

La guerre de Corée

La Corée a été libérée en 1945 de l’occupation japonaise par les Etats-Unis et l’URSS. Depuis, le 38e parallèle a servi de ligne de démarcation entre les deux puissances libératrices. La guerre de Corée débute le 25 juin 1950, quand la Corée du Nord, soutenue par Staline et Mao, agresse militairement la Corée du Sud en franchissant le 38e parallèle en quatre points différents. L’attaque nord-coréenne est rapide : Séoul est prise dès le 26 juin. Les Etats-Unis envoient alors, avec l’accord de l’ONU, un corps expéditionnaire composé de 15 nations placé sous le commandement du général MacArthur. Lorsque les troupes de l’ONU débarquent à Inchon le 15 septembre, seule une petite bande de terre autour de Pusan, au Sud-Est, est aux mains des Sud-Coréens et des Américains. La situation se retourne rapidement : dès le 28 septembre, les forces de l’ONU libèrent Séoul ; le 1er octobre, elles passent le 38e parallèle ; le 25 octobre, elles atteignent le fleuve Yalu, séparant la Corée du Nord de la Chine.
Mao, soutenu par Staline, envoie alors 500 000 « volontaires » chinois pour une contre-offensive. Le 4 décembre, les troupes communistes reprennent Pyongyang ; le 26 décembre, elles franchissent le 38e parallèle. Le général MacArthur, qui veut utiliser l’arme atomique en Mandchourie, est désavoué par Truman qui craint une généralisation du conflit. L’ONU lance une nouvelle offensive le 25 janvier 1951, qui renverse encore le rapport de force. Le général Ridgway, successeur de Mac Arthur, parvient à refouler les forces communistes au-delà du 38e parallèle, où le front se stabilise. L’armistice est signé près de deux ans plus tard, en juillet 1953. Le conflit a été particulièrement meurtrier (plus 4 millions de morts) et a dévasté le pays du fait des intenses bombardements. Les blocs se raidissent et les Etats-Unis menacent l’URSS de représailles massives en cas de nouvelle agression.

Le temps de la « coexistence pacifique » (1953-1979)

L’apaisement des relations internationales

La mort de Staline, dirigeant de l’URSS depuis 1924, ouvre une nouvelle ère à l’Est. Son successeur, Nikita Khrouchtchev, entend apaiser les relations avec l’Ouest dans le cadre d’une « coexistence pacifique ». Ce dégel s’inscrit dans le contexte d’une Union soviétique sûre d’elle-même : elle détient la bombe atomique et a envoyé le premier satellite (Spoutnik) et le premier cosmonaute (Youri Gagarine) dans l’espace. Khrouchtchev, qui annonce le rattrapage des Etats-Unis, considère le monde capitaliste sur la défensive.
Cette politique de détente est illustrée en 1956 par la condamnation commune des États-Unis et de l’URSS de l’intervention militaire franco-britannique dans le canal de Suez, nationalisé par l’Égypte de Nasser proche de l’Union soviétique.

En 1963 est mise en place une ligne de liaison directe entre le dirigeant de l’URSS et le président des États-Unis (le « téléphone rouge »). Le président Kennedy abandonne l’idée de représailles massives en cas d’agression soviétique pour celle d’une « riposte graduée », consistant en une réponse proportionnelle à la nature de l’agression.
Des deux côtés, il n’y a pas de désarmement mais un engagement sur la limitation de l’arsenal militaire (traité de Moscou de 1963). Un traité de non-prolifération des armes atomiques est signé en 1968. En 1969 s’ouvrent les négociations SALT (Strategic Arms Limitation Talks), visant à limiter la croissance des armements stratégiques, qui débouchent sur les accords SALT 1 en 1972. La même année, la RFA et la RDA normalisent leurs relations. Les accords d’Helsinki de 1975, garantissant les frontières européennes, la libre circulation des idées et des hommes, le respect des droits de l’Homme marque l’apogée de la détente.

Les contradictions de la « coexistence pacifique »

La « coexistence pacifique » a des limites : le 14 mai 1955 est conclu le pacte de Varsovie, traité de coopération et d’assistance mutuelle entre les pays du bloc de l’Est, qui forme un contrepoids à l’Alliance atlantique. En 1956, les chars de l’Armée rouge écrasent l’insurrection de Budapest, mouvement spontané dirigé contre le régime soviétique. L’honneur des deux camps se joue aussi dans l’espace (Spoutnik en 1957, premier satellite artificiel, et Youri Gagarine en 1961 pour les Soviétiques, Neil Armstrong sur la Lune en 1969 pour les Etats-Unis).

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Construction du mur de Berlin (1961).


En 1961 s’enclenche la « seconde crise de Berlin ». Bastion avancé du « monde libre », Berlin-Ouest affiche son dynamisme économique et ses libertés démocratiques aux Allemands de l’Est qui fuient par centaines de milliers vers l’Ouest. Afin de mettre fin à l’hémorragie, la RDA décide d’ériger un mur coupant Berlin en deux. Du 12 au 13 août 1961 est enclenchée l’opération « muraille de Chine » qui déploie 25 000 soldats et miliciens le long de la frontière berlinoise et y installe 130 kilomètres de barbelés. Face à l’absence de réaction occidentale, un mur de béton commence à être construit le 15 août. Cette initiative scandalise le « monde libre » qui voit dans ce « mur de la honte » le symbole de la division de l’Europe.

Mais la crise la plus grave de la guerre froide se produit au début des années 1960 après que Fidel Castro ait renversé à Cuba une dictature corrompue soutenue par les Etats-Unis (1959). Le nouveau régime cubain, qui met en place une économie socialiste, se rapproche de l’URSS. Kennedy se laisse convaincre d’un débarquement dans la baie des Cochons, mené par des exilés cubains, afin de renverser le régime castriste. L’échec de l’opération en 1961 provoque une montée des tensions. Le régime cubain conclut une alliance militaire avec l’URSS qui l’aide à installer des rampes de lancement de missiles. En octobre 1962, Kennedy découvre ces rampes de lancement et apprend que des navires soviétiques se dirigent vers Cuba avec à leur bord des ogives nucléaires pouvant toucher les côtes américaines. Alors que le monde est au bord d’un nouveau conflit de grande ampleur (Etats-Unis comme URSS envisagent une guerre atomique), les Etats-Unis décident d’un blocus de l’île. Prenant conscience des risques d’une nouvelle guerre, les Soviétiques battent en retraite.

Des blocs ébranlés

La détente Est-Ouest s’opère alors que les deux blocs s’affaiblissent. La Chine communiste rompt avec son voisin soviétique. A partir de la fin des années 1950, la Chine critique ouvertement la doctrine de la « coexistence pacifique »; en 1960, l’URSS suspend toute aide à son ancien allié chinois. En 1969 ont même lieu des affrontements à la frontière des deux pays. Dans l’Europe de l’Est, la Tchécoslovaquie se soulève en 1968 contre la domination soviétique lors du « Printemps de Prague ». Si l’URSS parvient à écraser la révolte, elle se voit obligée de reconnaître plus d’autonomie à la Roumanie de Ceauçescu.

Du côté du camp occidental, la France du général De Gaulle (1958-1969) critique le leadership américain et prône une « Europe des patries » indépendante des Etats-Unis. Si la France reste dans le camp américain comme en témoigne son positionnement dans la crise des missiles de Cuba, elle se retire en 1966 des structures militaires de l’OTAN et refuse par deux fois l’entrée du Royaume-Uni dans la CEE. Mais surtout, les Américains s’enlisent dans la guerre du Vietnam (1964-1973). Le Vietnam était divisé depuis 1954 entre un Nord communiste et un Sud nationaliste. Une rébellion communiste dans le Sud, ayant pour but de réunifier le pays sous la bannière du Nord, gagne du terrain. Les Etats-Unis engagent des moyens énormes sans arriver à vaincre un ennemi qui applique la stratégie de la guérilla. Coûteuse en hommes et en argent et paraissant sans issue, cette guerre est de plus en plus impopulaire auprès des Américains. Les Etats-Unis quittent le Vietnam en 1973. Deux ans plus tard, le Sud-Vietnam tombe aux mains des communistes. C’est un échec de la stratégie du containment et un traumatisme qui va pousser les Etats-Unis au désengagement.

L’effondrement de l’Union soviétique (1979-1991)

Le tournant de 1979-1980

L’URSS profite de la détente pour soutenir les mouvements révolutionnaires dans le Tiers-Monde. En 1979, au Nicaragua, un régime marxiste soutenu par Cuba prend le pouvoir. En Iran, la même année, la prise du pouvoir par l’islamiste Khomeini provoque un deuxième choc pétrolier et la prise en otage du personnel de l’ambassade américaine à Téhéran. Enfin, l’Armée rouge intervient pour la première fois en dehors du bloc soviétique en envahissant l’Afghanistan.
Le président Jimmy Carter décrète en 1980 un embargo contre l’URSS et appelle au boycott des Jeux Olympiques de Moscou. Les élections de novembre aux Etats-Unis amènent le républicain Ronald Reagan au pouvoir (réélu en 1984), incarnant une Amérique sûre d’elle-même (« America is back », «Let’s make America great again », slogans de campagne). Qualifiant l’URSS d’« Empire du Mal », il annonce qu’il apportera son soutien aux « combattants de la liberté », partout où ils se trouvent.

La rivalité entre les deux superpuissances

La stratégie adoptée par Reagan, qui entend mettre les Etats-Unis en position de force, met un terme à la détente. En 1980, les dépenses militaires américaines représentent 25 % des dépenses mondiales (142,7 milliards de dollars), en 1988 elles en représentent 33 % (290 milliards de dollars). Une politique de soutien aux guérillas anti-marxistes est entamée afin de repousser le communisme dans le monde. La course aux armements reprend. Reagan annonce en 1983 l’IDS (Initiative de défense stratégique), système de défense visant à protéger les Etats-Unis de l’arme atomique par un « bouclier spatial ». C’est un défi et un coup de bluff qui est lancé à l’Union soviétique, obligée d’accomplir de gigantesques efforts technologiques.

En URSS, Mikhaïl Gorbatchev, un jeune quinquagénaire, arrive au pouvoir en 1985 avec la volonté de changer en profondeur l’URSS. Le pays traverse alors une crise profonde : la croissance s’essouffle et les objectifs des plans quinquennaux deviennent de plus en plus modestes. L’économie ne parvient pas à soutenir la course aux armements avec les Etats-Unis. L’accident de Tchernobyl (avril 1986) montre au monde entier l’état catastrophique dans lequel se trouve plongée la Russie soviétique. Gorbatchev tente de « sauver » l’URSS en lançant une série de réformes. D’une part il tente de démocratiser le régime (Glasnot) en levant la censure et organisant des élections libres (en 1989). D’autre part, il tente de réformer l’économie (Perestroïka) en introduisant des éléments capitalistes : rétablissement du secteur privé, disparition des travailleurs surnuméraires (apparition du chômage), introduction de la notion de rentabilité des entreprises, etc. Cette nouvelle politique permet la reprise du dialogue avec les Etats-Unis.

La chute de l’URSS

Malgré les efforts de Gorbatchev, l’URSS paraît irréformable. La Glasnot permet les mouvements de contestation, les grèves; la Perestroïka provoque une inflation et une baisse de la production. La crise économique et politique s’aggrave. L’Armée rouge se retire d’Afghanistan en 1988-1989. En 1989, le pacte de Varsovie reconnaît « le droit de chaque nation de décider librement de sa politique » : l’URSS libère ses anciens satellites européens (chute du « rideau de fer », réunification allemande). Si Gorbatchev est populaire en Occident, il l’est beaucoup moins dans son propre pays où l’insatisfaction grandit. Les pays Baltes proclament leur indépendance en 1990. Arméniens et Azéris s’opposent dans la région du Caucase. Afin de mettre un terme aux troubles, Gorbatchev propose une « nouvelle Union ». En août 1991, une tentative de putsch organisée par ses opposants conservateurs échoue. Boris Eltsine, président de la République de Russie, organise en décembre 1991 la CEI (Communauté des Etats Indépendants) qui signe la mort de l’URSS. Le 25 décembre 1991, la démission de Gorbatchev confirme la disparition de l’URSS, remplacée par 15 Etats souverains.

Les Etats-Unis sortent donc vainqueurs de la guerre froide et, en tant que seule superpuissance de l’espace mondial, se donnent le rôle de « gendarme du monde ». Ils interviendront ainsi en 1991 au nom de l’ONU dans le Golfe Persique après l’invasion du Koweït par l’Irak (1990).

Bibliographie :
BERTSEIN Serge, MILZA Pierre, Histoire de l’Europe du XIXe au début du XXIe siècle, Paris, Hatier, 2006.
NOUAILHAT Yves-Henri, Les Etats-Unis de 1917 à nos jours, Paris, Armand Colin, 2009.

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