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L'Histoire de France, de l'Europe & du Monde

La Première Guerre mondiale est une rupture capitale dans l’histoire du monde qui marque l’entrée dans la modernité et un XXe siècle de grands conflits. La montée des tensions internationales, plongeant ses racines dans le XIXe siècle, et l’engrenage des alliances entraînent un tragique incident en une guerre qui va durer plus de 4 ans. Cette guerre, que l’on imaginait courte et facile (comme toutes les guerres du XIXe siècle), va se révéler extrêmement meurtrière.

Les origines du conflit

Alliances et rivalités européennes

A la fin du XIXe siècle, le chancelier Bismarck, vainqueur de la guerre franco-prussienne de 1870, consolide ses alliances : la Duplice est signée avec l’Autriche-Hongrie en 1879, et trois ans plus tard, l’Italie rejoint la Duplice, formant ainsi la Triple Alliance (ou Triplice). Dans le même temps, il poursuit sa politique anti-française qui vise à empêcher tout rapprochement de la France avec un autre pays. La France est alors isolée diplomatiquement en Europe, se posant notamment en adversaire de la Grande-Bretagne dans le cadre de l’entreprise coloniale (incident de Fachoda en 1898). Cependant, le renvoi du chancelier en 1890 et la Weltpolitik (« politique mondiale ») du jeune empereur Guillaume II vont bouleverser l’équilibre européen. En 1888, l’empereur d’Allemagne Guillaume II décide de ne pas renouveler un accord bilatéral avec la Russie, ce qui inquiète fortement le tsar Alexandre III : la Russie n’a plus d’allié en Europe. Le tsar va ainsi entamer un rapprochement avec la France et signe un traité défensif en 1893. Malgré l’hostilité affichée du tsar à l’égard du régime républicain, l’alliance franco-russe est scellée. Dans le même temps, l’habile ministre des Affaires étrangères français, Théophile Delcassé, va se rapprocher de l’Italie. Mais le plus inattendu est l’alliance franco-britannique de 1904 : c’est « l’Entente Cordiale ». En 1907, une alliance entre l’Angleterre et la Russie finit de constituer la Triple Entente.

En ce début de XXe siècle, l’échiquier européen est donc bouleversé, et deux blocs rivaux se font face :

  • La Triple Alliance (Allemagne, Autriche-Hongrie, Italie).
  • La Triple Entente (France, Russie, Royaume-Uni).

La Triple Entente et la Triple Alliance ont alors un caractère dissuasif. Mais elles peuvent aussi avoir un rôle d’accélérateur de conflit.

La montée des tensions internationales

Les réseaux d’alliances ne font que renforcer des tensions déjà existantes. Toutes les puissances européennes réarment à un rythme accéléré. Les budgets militaires s’accroissent d’une façon considérable.
L’Allemagne se dote d’une puissante flotte de combat qui menace la suprématie britannique sur les mers. Entrée tardivement dans l’entreprise coloniale, l’Allemagne entend se tailler une part du gâteau. L’empereur Guillaume II provoque par deux fois la France au Maroc (1905 et coup d’Agadir en 1911) et exacerbe les nationalismes. De son côté, la Russie, qui connaît des tensions internes dues notamment à la défaite humiliante contre le Japon en 1904-1905, entend affirmer sa puissance et stabiliser le régime par une guerre victorieuse. L’Empire ottoman, surnommé « le vieil homme malade de l’Europe », est en pleine désagrégation ; les Balkans sont en ébullition. La Serbie, quant à elle, sort renforcée des guerres balkaniques et devient la bête noire de l’Autriche-Hongrie.

L’idée qu’une guerre est possible, voire inévitable, s’installe dans les esprits. Les Etats européens instaurent une trêve dans les luttes politiques internes (l’« Union sacrée »), et se tiennent prêts à jeter toutes leurs forces dans la bataille pour tenter d’en finir en quelques semaines.

D’un conflit local à la guerre mondiale

L’assassinat, à Sarajevo, le 28 juin 1914, du prince héritier d’Autriche, François-Ferdinand, sert de détonateur à la guerre. La Serbie est accusée d’être responsable de la mort de François-Ferdinand. Un ultimatum inacceptable imposé aux Serbes, et que ceux-ci repoussent, déclenche le conflit le 28 juillet.
Par l’engrenage des alliances et le système des blocs, tous les Etats européens se trouvent tour à tour engagés dans la guerre. Ils imaginent qu’elle sera courte : quelques semaines au plus. Elle va se révéler bien plus meurtrière que prévu. Seuls quelques pays comme les pays Nordiques, l’Espagne, ou le Portugal restent neutres.

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La une du Petit Parisien, le 29 juin 1914.

Les opérations militaires

De la guerre de mouvement…

Le plan français consiste à concentrer les troupes sur la frontière franco-allemande. Le plan allemand, appelé plan Schlieffen, consiste à miser sur la lenteur de la mobilisation russe pour établir un front défensif en Prusse Orientale et envoyer la majeure partie des troupes sur la France. L’armée allemande pense contourner la frontière franco-allemande en passant par la Belgique, attaquer le flanc gauche de l’armée française et de pivoter sur Paris. Pour faire échouer le plan Schlieffen, les états-majors franco-russes lancent une double offensive avant même que toutes les troupes ne soient rassemblées. Mais très vite, la bataille des frontières se révèle être un échec patent. Les Allemands déferlent sur la France du Nord. Le 2 septembre 1914, les avant-gardes de l’armée impériale sont à 25 kilomètres de Paris : la capitale est évacuée par le gouvernement et les Chambres. Sur le front de l’Est, la situation n’est pas meilleure, les Russes sont vaincus à Tannenberg par Hindenburg. L’armée russe va perdre 1 million d’hommes en un an. Néanmoins en France le général Joffre sauve la situation. Après une grande offensive le 6 septembre, la victoire de la Marne oblige les Allemands à reculer. Fin novembre, le front de France se stabilise de la mer du Nord à la frontière suisse.

… à la guerre de position

Dans les deux camps, l’échec de la stratégie des grandes offensives inclinent les états-majors à établir de solides positions défensives. On assiste à la création des tranchées avec barbelés. Les soldats vont vivre là pendant trois longues années, dans des conditions abominables, côtoyant la mort et la folie.
La stratégie de la percée, consistant à amasser le plus grand nombre de soldats possibles sur un point précis du front pour déborder l’ennemi, utilisée aussi bien par les Alliés que la Triplice, aboutit à d’effroyables hécatombes.
A l’arrière, les gouvernements mobilisent les civils en pratiquant une propagande massive (bourrage de crâne) et en utilisant toutes les forces économiques. Jamais aucune guerre européenne n’avait nécessité une aussi importante concentration d’énergie et de moyens.

On voit apparaître de nouveaux armements :

  • La grenade à main.
  • L’artillerie à tir hyperbolique (mortier): exemple du crapouillot en France.
  • Les gaz.

L’année 1915 est marquée par une initiative malheureuse des Alliés : le débarquement dans les Dardanelles, qui, sous la résistance des Turcs, aboutit à un fiasco ; mais aussi par un succès diplomatique : l’Italie change de camp en s’alliant aux Alliés, et la Bulgarie, puis la Roumanie en 1916 entrent en guerre aux côtés de l’Entente. En 1916 se met en place la stratégie de la guerre d’usure : on prépare le terrain à l’aide de l’artillerie (nombreux bombardements) avant de lancer l’assaut. A l’Ouest, l’événement capital est la bataille de Verdun, un échec allemand qui révèle le général Pétain.

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A Douaumont, des soldats allemands tirent sur des assaillants français (1917).

1917 : le tournant du conflit

Deux événements majeurs marquent l’année 1917 :

  • L’entrée en guerre des Etats-Unis.
  • La révolution bolchévique en Russie.

Les Allemands comprennent l’intérêt de favoriser les mouvements révolutionnaires en Russie : ils ramènent Lénine, qui est en Suisse, au pays. Le tsar Nicolas II est rendu responsable des échecs militaires. En mars 1917, une révolution dirigée par les libéraux fait abdiquer Nicolas II en faveur de son frère, qui décline la couronne. Mais le gouvernement provisoire libéral s’avère incapable de gérer le conflit, faisant ainsi pencher la balance du côté des bolcheviks, partisans d’une paix rapide. L’armistice signé permet à la Triplice de porter tout ses efforts sur le front occidental. Du côté allié, Clemenceau et Lloyd George songent au démantèlement de l’Autriche-Hongrie pour créer une série d’Etats-tampons devant la Russie afin de stopper l’expansion du bolchévisme.

L’entrée en guerre des Etats-Unis va heureusement compenser le retrait russe. Le président Wilson souhaite répondre à la guerre sous-marine à outrance allemande dans laquelle de nombreux navires de commerce américains ont été coulés (affaire du Lusitania en 1915). Le 13 juin 1917, les premiers contingents américains débarquent à Boulogne, commandés par le général Pershing.

La guerre de mouvement reprend grâce notamment à l’apparition des premiers chars blindés. Ceux-ci vont jouer un rôle considérable dans la seconde offensive de la Marne. L’aviation, elle-aussi commence à jouer un grand rôle.

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Chars Renault FT sur leur chaîne de montage.

La victoire finale et les conséquences de la Grande Guerre

La victoire alliée

Cependant, les Allemands en 1918 accumulent les victoires, arrivant même à moins d’une centaine de kilomètres de Paris. Mais le 18 juillet 1918, la contre-attaque alliée est lancée. Six cents avions et mille chars Renault (plus perfectionnés qu’auparavant) vont soutenir l’attaque. L’offensive alliée se développe dans les Balkans (la Grèce entre en guerre aux côtés des alliés) mais aussi en Palestine, obligeant les Turcs à déposer les armes. Fin octobre 1918, les Italiens percent le front autrichien et obligent ces derniers à signer l’armistice. En Autriche-Hongrie, les mouvements nationaux, contenus depuis un siècle mettent à profit la défaite de la double-monarchie pour proclamer à Prague la république Tchèque et à Vienne la république d’Autriche. Mais l’effondrement de l’Allemagne ne vient pas de l’armée : il va surtout être interne, sous la pression des soulèvements révolutionnaires animés par une immense lassitude et des carences alimentaires. Guillaume II abdique et s’enfuit en Hollande. Le 11 novembre 1918, l’armistice est signée à Rethondes.

De l’armistice au traité de Versailles

Du 12 janvier au 28 juin 1919 se tient la conférence de la Paix à Paris. Elle rassemble les délégués d’une trentaine de pays. Les Etats vaincus et la jeune république soviétique n’y sont pas présents.
Il s’agit comme en 1815 au Congrès de Vienne de reconstruire l’Europe. Les 14 points de Wilson, sur lesquels devra être fondée la paix future comportent notamment ces propositions :

  • Création d’une organisation internationale pour régler les conflits (SDN).
  • Droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.
  • Non attribution de la responsabilité de la guerre (aucun pays n’est responsable).
  • Restitution de l’Alsace-Lorraine à la France.

Ces points, qui expriment de la part de Wilson un souci d’éviter au maximum la frustration des vaincus, paraissent utopiques aux yeux des Européens. Pour les Alliés, il est hors de question que les Allemands s’en sortent avec les 14 points de Wilson. L’Allemagne est ainsi rendue responsable de la première guerre mondiale.

Le traité de Versailles est signé le 28 juin 1919 dans la Galerie des Glaces et règle le sort du présumé responsable de la guerre: l’Allemagne. L’Allemagne se voit amputée de la Posnanie et d’une partie de la Prusse occidentale au profit d’une reconstitution de la Pologne qui a ainsi accès à la mer Baltique par le biais d’un corridor de 80 kilomètres de long. L’Allemagne, qui perd un septième de son territoire, refusera de reconnaître ses nouvelles frontières orientales. La jeune république de Weimar voit également son armée réduite à 100 000 hommes, et ne peut posséder ni aviation de combat, ni tanks, ni artillerie lourde, ni marine de guerre. Enfin, l’Allemagne doit payer des réparation dont le montant va être fixé à 132 milliards de marks-or.

Le bilan humain, moral et matériel

La Première Guerre mondiale a été un conflit d’une violence et d’une ampleur inédite. Elle a été une guerre totale car elle a mobilisé toutes les forces du pays (militaires, économiques, sociales). Elle ne s’est pas terminée par une écrasante victoire mais plutôt par l’épuisement des Etats en conflit : l’Allemagne s’est effondrée de l’intérieur.
Le bilan humain s’élève à environ 9 millions de morts et 8 millions d’invalides (les « gueules cassés »), soit environ 6000 morts par jour. Proportionnellement, la France est le pays le plus touché avec 1,4 millions de disparus, soit 10 % de la population active masculine. Cela s’accompagne d’un déficit des naissances très important, surtout en Russie où il s’élève à 26 millions. Mais le bilan matériel est également lourd : grave pénurie de main d’oeuvre, désorganisation des circuits commerciaux traditionnels,… problème de la reconversion de l’économie de guerre en économie de paix. Des dizaines de milliers d’hectares sont dévastés. Les pertes matérielles et humaines s’accompagnent aussi de changements sociaux : aspiration à la paix, mise en avant de la femme, réorganisations des sociétés.
La guerre de 1914-1918 va avoir un impact lourd sur les années 1920, 1930.

Bibliographie :
Bernard, Mathias. Introduction au XXe siècle. Tome 1 : 1914 à 1945. Belin, 2003.
Berstein, Serge ; Milza, Pierre. Nationalismes et concert européen. 1815-1919 (Tome 4). Hatier, 1996.

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